Extraction automatique d’indicateurs de santé des systèmes d’informations de soins: le projet Global Health Barometer
DOI:
https://doi.org/10.12856/JHIA-2013-v1-i1-75Abstract
Contexte et objectifs:
Dans la grande majorité des pays à faibles ressources, la collecte d’indicateurs de santé et l’organisation d’un rapportage fiable sur les activités des structures sanitaires restent aujourd’hui un important problème. Pourtant, de nombreux acteurs comme les ministères de la santé, les projets de financement basé sur la performance, les programmes d’assurance maladie et bien d’autres dépendent en grande partie d’informations complètes et correctes sur les systèmes de santé.
A ce jour, l’enregistrement et la centralisation des indicateurs se réalise dans la plupart des pays principalement à l’aide de procédures d’enregistrement parallèles et redondantes (systèmes nationaux d’informations sanitaires, DHIS2, programmes verticaux comme le VIH, TB et autres), avec des registres qui sont souvent spécifiques pour chaque destinataire. Dépendant du nombre de partenaires impliqués, certains centres de santés en région sub-saharienne doivent remplir périodiquement plus de 30 registres différents. Ce travail représentant une charge médico-administrative supplémentaire excessive, la qualité des informations fournies est très souvent inexploitable. Parfois même, des données totalement fictives (copies légèrement modifiées d’anciens rapports) sont envoyées par des centres qui manquent de temps et de personnel pour correctement réaliser cette activité.
Suite à ces constats, en 2010 le projet du Global Health Barometer (GHB) a été mis sur pied, avec comme objectif de fournir un rapportage alternatif d’indicateurs de santé basé sur l’extraction d’informations des systèmes d’informations de soins (SIS) présents dans les structures sanitaires sub-sahariennes.
Méthodes:
Le projet a été conçu autour de la création d’un data-warehouse de santé (DWS), pouvant accueillir un grand nombre de différents types de données sanitaires (administratives, financières, pharmaceutiques, laboratoires, cliniques, statistiques etc.). Le DWS devrait être accessible à travers une interface web et une série d’interfaces informatiques devraient être définies pour permettre aux SIS d’envoyer des informations à cette base de données centrale. Les interfaces spécifient aussi bien la syntaxe des messages que la sémantique de leur contenu, tout étant basée au maximum sur des classifications internationales comme la CIM-10, la CISP-2 ou le LOINC.
Une implémentation pilote devrait ensuite être mise en place sur base d’une sélection de SIS existants, dans lesquels un nombre de modules d’extraction spécifiques pour le GHB devraient être intégrés.
Résultats:
Le DWS a été développé en 2010 et est accessible via le web sur un URL public : http://www.globalhealthbarometer.net. Une implémentation pilote a été réalisée sur base d’un SIS à sources libres (OpenClinic) qui était déjà déployé en 2010 dans une vingtaine de sites au Rwanda, au Burundi, en Belgique et en RDC. Au cours des 3 années de l’étude, d’autres hôpitaux situés au Mali et au Congo-Brazzaville ont encore été ajoutés. En 2013, 35 sites sont interconnectés dans un VPN dédié au projet et envoient chaque nuit sans aucune intervention utilisateur un nombre important d’indicateurs structurés au DWS. Il s’agit d’indicateurs démographiques, financiers, diagnostiques, laboratoires, des chiffres de mortalité et même des indicateurs informatiques (espace disque libre, mémoire utilisée etc.) informant la cellule centrale sur l’état des différents serveurs. Le volume de données récoltées est vaste : en août 2013 plus de 2 millions de dossiers patients, 300.000 hospitalisations, plus de 2 millions de consultations et plus de 13 millions de prestations ont été documentés dans l’implémentation pilote du DWS pour 35 hôpitaux.
A travers l’interface web, ces données peuvent être interrogées à tout moment par les utilisateurs disposant d’un code de sécurité qui leur donne accès aux à un nombre de sites correspondant à leurs responsabilités. Le site web offre non seulement la possibilité de tirer des statistiques ou de générer des graphiques, mais permet également d’automatiser un nombre d’opérations comme l’impression centralisée de cartes d’identification ou le transfert de données de couverture maladie et de facturation entre prestataires de soins et assureurs.
Conclusions:
Sur base des résultats obtenus au cours des 3 années de cette étude pilote, l’utilisation secondaire des données de soins moyennant des procédures d’extraction automatiques s’avère une alternative potentiellement attractive pour un nombre de procédures existantes de collecte d’indicateurs de santé. Les extraits étant basés sur des données réelles de soins et aucun travail supplémentaire n’étant nécessaire pour la production des indicateurs, on pourrait espérer obtenir des rapports plus complets qui correspondent mieux à la réalité du terrain.
Les expériences dans le cadre de ce projet avec la transmission de données d’assurance maladie entre prestataires de soins et assureurs confirment que, moyennant un nombre de développements supplémentaires, des systèmes comme le GHB pourront en plus jouer un rôle de passerelle de données dans le futur. Pensons aux possibilités de rapportage central (plus besoin d’envoyer des rapports par les structures sanitaires), l’implémentation de la couverture maladie universelle, la surveillance épidémiologique, les programmes de financement basé sur les performances et bien-sûr la retransmission de données aux différents programmes verticaux de santé. Dans ce cadre, une intégration avec le DHIS2 est actuellement en développement.